Ricky / François Ozon

Publié le par Limess




Sortie: 11 février 2009

> L'histoire: Quand Katie, une femme ordinaire, rencontre Paco, un homme ordinaire, quelque chose de magique et de miraculeux se produit: une histoire d'amour. De cette union naîtra un bébé extraordinaire: Ricky.

On se demande toujours jusqu'où sont capable d'aller les publicitaires pour vendre un film et attirer les foules. Et s'il fallait prendre une oeuvre en exemple,
Ricky serait un cas parfait. C'est tout d'abord un teaser qui présenta aux spectateurs les premières images du nouveau François Ozon, laissant planer le mystère sur ce bébé étrange, un brin démoniaque. Éveillant à la fois la curiosité et le scepticisme de certains. Jusqu'à ce que la bande annonce finale viennent briser le secret, révélant sans subtilité tout l'intérêt du long métrage: son côté fantastique et le caractère extraordinaire de ce bébé. De quoi caser l'aura qui entourait cette histoire originale, tout comme le suspense de sa première partie. Le film reposant alors sur la culpabilité ou non du personnage de Paco. Espérons donc qu'à défaut d'avoir bouder le plaisir de plusieurs cinéphiles, elle aille au moins permise de ramener les gens dans les salles...


Ricky
, c'est l'occasion pour François Ozon de faire une nouvelle fois preuve de beaucoup d'inventivité, autant sur le fond que sur la forme. Avec son nouveau film, le réalisateur fait le choix de se réapproprier les codes du genre fantastique en travaillant sur le surgissement de l'extraordinaire dans la réalité quotidienne. Le tout de manière extrêmement minutieuse. Le film s'ouvre ainsi sur une séquence où Alexandra Lamy, filmée au naturelle, sans maquillage - tout comme Rossellini l'avait fait avec Ingrid Bergman - confesse son désespoir et son impuissance suite à la naissance de son deuxième enfant. Flash-back. Katie - Lamy, donc - vit dans une banlieue triste avec sa fille. Quelques séquences suffisent pour exposer son quotidien, filmé de manière frontale et froide, des trajets en scooter au boulot à l'usine, et les décors qui entourent sa vie. Très vite, elle rencontre Paco et entame une relation avec lui. Emménagement. Naissance de Ricky. Le rythme est effréné, Ozon passant sous silence des pans entiers de leur histoire, au risque d'en décontenancer plus d'un. Comme si l'intérêt était ailleurs. La force du travail d'Ozon, c'est qu'il joue sur le glissement entre l'ordinaire et l'extraordinaire, la rencontre avec Paco venant bouleverser le quotidien de Katie et sa relation avec sa fille, puis vers l'extraordinaire le plus littéral du terme. Là, ce n'est plus la vie que Katie connaît qui va se retrouver chamboulé, mais celui de tous, spectateurs compris. Ricky étant un bébé qui sort, justement, de l'ordinaire... Cela, Ozon le travaille par petites touches. C'est d'abord un papier peint, posé dans la chambre de Ricky, où le motif du ciel donnera un côté magique. Un jeu de lumière, ensuite, et de la musique, enfin, sortant l'intrigue des gris du début, ceux des HLM et de l'humeur de Katie. Faisant surgir l'a-normalité dans la normalité la plus banale et quotidienne, à la fois à travers le personnage de Ricky, donc, et celui de Katie, au départ si transparente, et devenant, finalement, le centre d'attention de tous.


S'appuyant sur ce trajet vers le fantastique,
Ozon fait le choix de ne pas proposer un récit linéaire, rendant un brin plus flou l'agencement des choses. C'est le cas de cette fin ouverte, qui déconcerte, tant elle tend à plusieurs analyses. Est-elle réellement à sa place ou correspond t-elle au point de départ de l'intrigue ? Une question à laquelle le film ne répond pas, laissant le spectateur se faire son propre avis et imaginer ce qu'il veut. Un parti pris qui se révèle néanmoins quelque peu néfaste pour l'oeuvre, faisant apparaître une construction un poil compliquée pour finalement pas grand chose. Qu'importe, Ozon aura dans tous les cas fait preuve de beaucoup de mérite, proposant une oeuvre originale et atypique au milieu des autres productions françaises qui sortent actuellement. Atypique, aussi bien par le genre choisit que par ses choix de comédiens, laissant de côté les étiquettes, donnant ainsi le beau rôle à une Alexandra Lamy étonnante, faisant véritablement office de révélation. Avec ce rôle, elle arrive enfin à se détacher de son image d'Alex, dans Un gars, une fille, et faisons le pari, elle ne devrait pas tarder à décrocher de nombreuses propositions dans des registres différents que la comédie. Au final, Ricky est donc un film qui surprend, dans sa capacité à proposer quelque chose de neuf et d'original. Et peut importe la forme, François Ozon aura dans tous les cas réussit son pari, celui de se renouveler tout en dépoussiérant, à sa manière, la marmite des productions françaises. Chapeau.






Crédit photo: Le pacte  

Publié dans En salles

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