Micmacs à tire-larigot / Jean-Pierre Jeunet
Sortie: 28 octobre 2009
> L'histoire: Une mine qui explose au coeur du désert marocain et, des années plus tard, une balle perdue qui vient se loger dans son cerveau... Bazil n'a pas beaucoup de chance avec les armes. La première l'a rendu orphelin, la deuxième peut le faire mourir subitement à tout instant. A sa sortie de l'hôpital, Bazil se retrouve à la rue. Par chance, ce doux rêveur, à l'inspiration débordante, est recueilli par une bande de truculents chiffonniers aux aspirations et aux talents aussi divers qu'inattendus, vivant dans une véritable caverne d'Ali-Baba : Remington, Calculette, Fracasse, Placard, la Môme Caoutchouc, Petit Pierre et Tambouille. Un jour, en passant devant deux bâtiments imposants, Bazil reconnaît le sigle des deux fabricants d'armes qui ont causé ses malheurs. Aidé par sa bande d'hurluberlus, il décide de se venger. Seuls contre tous, petits malins contre grands industriels cyniques, nos chiffonniers rejouent, avec une imagination et une fantaisie dignes de Bibi Fricotin et de Buster Keaton, le combat de David et Goliath...
Dans Micmacs à tire-larigot, Jean-Pierre Jeunet retrouve, comme ils les avaient laissés, les pavés d'un Paris mêlant passéisme et modernité. Il y donne vie à Bazil, un ancien loueur de vidéo club devenu SDF suite à une fusillade où il prit une balle dans la tête. Obligé de se débrouiller pour survivre, il rencontrera bientôt une superbe bande de pieds nickelés, prêt à tout pour l'aider... Comme à son habitude, Jean-Pierre Jeunet fait une nouvelle fois preuve d'un talent exquis quant il s'agit de créer un univers singulier et jusqu'au boutiste. A la couleur sépia se mêle un étrange mélange d'époques, laissant voguer ses "petits Poucet", à bord d'une voiture délabrée, faire la course avec un tramway électrique. Imposant une ambiance un peu nostalgique, propre à un certain cinéma français. Coincé par une histoire finalement très banale - le mythe de David et Goliath transfiguré en une vengeance d'un groupe de chiffonniers contre des trafiquants d'armes -, le cinéaste laisse la porte ouverte à un monde de tous les possibles. Lieu où le moindre objet peut prendre une tout autre utilité que celle originelle. Mais, est-ce parce que cette histoire pourrait provenir de l'esprit de Bazil, suite à un son accident ? Ou de l'imagination débordante de Remington, tapant son histoire farfelue sur sa petite machine à écrire ? Car, dans Micmacs à tire-larigot, Jean-Pierre Jeunet s'amuse, insérant, telle une mise en abyme, des affiches de son propre film dans les rues que foulent ses personnages. Donnant une certaine "explication" à ce joyeux délire scénaristique. Pourtant, malgré cette multiplicité d'idées foisonnantes , Micmacs à tire-larigot apparaît surtout, et très rapidement, comme une belle coquille vide...
Envolés la magie et l'onirisme d'Amélie Poulain, le nouveau Jeunet n'arrivant jamais à vraiment nous embarquer. La faute à un manque profond de nouveautés dans ce Paris dont il semble avoir fait le tour ? Peut-être. Quoi qu'il en soit, le cinéaste semble en permanence dans l'auto-parodie, retournant dans des lieux que l'on ne connaît que trop bien dans son cinéma. Et là où dans Amélie Poulain, Jean-Pierre Jeunet faisait du quotidien de ses personnages une incroyable singularité, chacun de ses protagonistes semblent, ici, avoir été écrit pour l'acteur qui l'incarne. Yolande Moreau est la femme bourrue, Omar Sy, cherche toujours les bons mots, Dominique Pinon fait avec sa douce folie, Dany Boon s'en sort bien en pseudo timide au grand coeur, les ensevelissant encore toujours un peu plus dans des rôles qui semblent leur coller à la peau. Et comme, chaque personnage se présente à travers une caractéristique, le scénario se fait dès lors on ne peut plus téléphoné, laissant à un moment donné son heure de gloire à chacun d'entre eux. D'où le malaise qui se dégage de ce Micmacs à tire-larigot, sorte de film-limite pour Jean-Pierre Jeunet qui fait preuve ici d'un profond manque d'originalité, lui qui en rajoute toujours plus pour pas grand chose - les séquences où Bazil se met à délirer -, faisant dans l'excès voir le mauvais goût, quant il s'agit de la scène finale. Dommage de la part de ce cinéaste, éminemment sympathique, dont la dernière trouvaille était attendue de pied ferme. Micmas à tire-larigot est une oeuvre ratée, plombée par une bande originale aussi lourde que le traitement du sujet. Agaçant et terriblement décevant.
1. Dany Boon: Le code a changé
2. Julie Ferrier: Didine / Paris
3. André Dussolier: Cortex / Les herbes folles
Crédit photo: Warner Bros France