Un prophète / Jacques Audiard
Sortie: 26 août 2009
> Synopsis: Condamné à six ans de prison, Malik El Djebena, ne sait ni lire, ni écrire. À son arrivée en Centrale, seul au monde, il paraît plus jeune, plus fragile que les autres détenus. Il a 19 ans. D'emblée, il tombe sous la coupe d'un groupe de prisonniers corses qui fait régner sa loi dans la prison. Le jeune homme apprend vite. Au fil des " missions ", il s'endurcit et gagne la confiance des Corses. Mais, très vite, Malik utilise toute son intelligence pour développer discrètement son propre réseau...
Premier français à concourir pour la palme d'or, Jacques Audiard est un cinéaste rare et c'est tant mieux, chacune de ses sorties cinés étant un vrai régal pour les spectateurs. Dans Un prophète, il suit toute la période d'incarcération d'un jeune dealer et son évolution progressive au sein d'une prison. Comme dans n'importe quelle société, il y a des règles spécifiques et des sortes de classes sociales, le but étant de se servir des premières pour gravir peu à peu les échelons imposés par les secondes. Découpé en plusieurs actes, Un prophète se construit comme une sorte de grande pièce de théâtre sur l'ascension sociale où Malik El Djebana passera à chaque fois à un niveau supérieur en terme de pouvoir. Passant du simple larbin à l'homme de main privilégié. Et comme souvent chez Audiard, son film est une pure oeuvre de genre, un polar noir où violence et politique – en arrière plan - sont extrêmement liées.
La force d'Un prophète tient à une réalisation très appliquée de la part du cinéaste et à un scénario particulièrement betonné, signé par Abdel Raouf Dafri, considéré comme l'un des nouveaux grands scénaristes du film noir... Sur 2h30, le film est extrêmement dense, arrivant à traiter avec une réelle efficacité dans le rythme d'une histoire passionnante, entièrement et de bout en bout. Et si certains le trouveront un peu long, tout semble ici nécessaire, Audiard s'amusant des symboliques et des resonances possibles entre les différentes parties, transformant avec intelligence ce petit caïd en un véritable messie. Malik est un personnage cinématographique comme on les aime, complexe et attachant, coincé entre deux entités, arabe de naissance, corse d'adoption.
Dans tous les cas, ce film ci nous prouve à quel point Jacques Audiard est roi quand il s'agit de maîtriser un suspense et une tension sans la faire retomber. Créant un huis clos oppressant et fascinant à l'intérieur de ses murs de bétons. L'occasion pour nous de découvrir aussi un excellent acteur, Tahar Rahim, l'une des vraies révélations de ce festival, ainsi que de revoir Niels Arestrup qui n'avait pas été aussi bon depuis bien longtemps. Violent, éprouvant et visuellement parfait, Un prophète est une oeuvre à la fois géniale et totalement bluffante, se classant automatiquement comme le plus grand et sérieux candidat à la future Palme d'or. Après Entre les murs, l'année 2009 serait-elle encore celle de la France ?
